28 Septembre 2019
Pour la communauté Le Tableau du Samedi gérée par Lady Marianne, voici ma participation du samedi 28 septembre, sur le thème « Vues des Villes ou des Monuments », d'après un choix de MONICA BREIZ ou sur un thème libre.
Pourquoi ai-je choisi ce tableau ?
Trois raisons principales m'ont motivée...
Je suis charmée par la remarquable esthétique du Pont des Arts et l'atmosphère rêveuse et bohème qui en émane...
J'aime beaucoup Jean Béraud, peintre amoureux de son époque et je prends grand plaisir à me promener dans le vent, énergie-souffle aux passions rebelles qui transfigure nos mouvements...
Les promeneurs s'activent sur le Pont des Arts, ancienne Passerelle des Arts, premier pont métallique national dont la construction fut décidée, le 15 mars 1801, par un décret de Bonaparte.
Ils montent et descendent dans un flux élégant, tels des fourmis bien habillées qui déambulent entre le Louvre et l'Institut de France.
Toujours très apprécié aujourd'hui de par sa position stratégique et la vue remarquable qu'il offre sur la Seine et les monuments alentour, le Pont des Arts était déjà très en vogue quand il s'appelait « Passerelle des Arts ».
Promenade à la mode, audacieuse dans sa composition en fonte, matériau plébiscité par l'industrie anglaise pour la construction des monuments utilitaires, la Passerelle des Arts vit son projet présenté, le 15 mars 1801, au Conseil des Ponts et Chaussées, par l'ingénieur Louis-Alexandre de Cessart (1717-1806).
La réalisation de l'ouvrage fut confiée à l'ingénieur Jacques Vincent Lacroix de Dillon (1760-1807) qui dessina neuf arches en fonte soutenant une plate-forme horizontale réservée aux piétons et dès l'inauguration, le 23 septembre 1803, les promeneurs furent en mesure de se réjouir.
Ils s'acquittaient d'un droit de péage et découvraient l'ensemble, conçu comme un jardin suspendu au-dessus des flots. Des bouquets parfumés, des arbustes verts, des plantes exotiques et des orangers en pots étaient répartis de part et d'autre des balustrades.
Amoureux et passants pouvaient jouir de la plaisante atmosphère des lieux, grâce aux bancs, aux échoppes et aux bateleurs qui s'y trouvaient. Un glacier y avait établi ses quartiers. Au fil de la nuit, les rencontres et les discussions s'étiraient, dans un ballet de lanternes... Il faut toutefois préciser qu'on pouvait éviter de payer « un sou » et passer par le Pont-Neuf.
En 1981, la passerelle visible sur le tableau de Jean Béraud a été détruite et entre 1982 et 1984, remplacée par une copie en acier d'une longueur de 155 mètres, réalisée par l'architecte urbaniste Louis Gerald Arretche (1905-1991).
Au lieu de posséder neuf arches en fonte, l'oeuvre est rythmée par sept arches symétriques en acier, élargies pour favoriser le passage des péniches et des bateaux mouches. Cette destruction était indispensable car la « dame de fonte » avait subi en 1942 des bombardements qui l'avaient fragilisée et trois accidents fluviaux majeurs, en 1961, en 1973 et en 1979, qui l'avaient endommagée de manière irréversible.
Le tableau de Jean Béraud décrit l'agréable atmosphère associée à ce passage au-dessus de l'eau qui unit la Grande Galerie du Louvre et le Quai de Conti, rive gauche, où se dresse l'Institut de France.
Ce bâtiment superbe, fleuron de la Culture Française était appelé autrefois Collège Mazarin ou Collège des Quatre-Nations. Sa fondation fut réclamée par Mazarin (1602-1661) dans son testament, en 1661, et financée par un legs de quatre millions de livres.
Il fut construit, à partir de 1663, par l'architecte Louis le Vau (1612-1670) qui dessina, en bordure de Seine, une façade courbe flanquée de deux pavillons décorés de pots-à-feu. En 1670, François d'Orbay (1634-1697) succéda à Louis Le Vau. Il conçut le célèbre dôme circulaire couronné par une élégante lanterne.
En 1805, Napoléon y transféra l'Institut de France et ses cinq académies, dont la plus célèbre demeure l'Académie Française. La coupole, intérieurement de forme elliptique, protège la salle où se réunissent les Sages.
Les académies sont l'Académie Française, l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, l'Académie des Sciences, l'Académie des Beaux-Arts et l'Académie des Sciences Morales et Politiques.
L'Institut abrite l'extraordinaire Bibliothèque Mazarine, la plus ancienne bibliothèque publique de France et, sous le dôme, la chapelle où trône le Tombeau de Mazarin, sculpté par Antoine Coysevox (1640-1720), Étienne le Hongre (1628-1690) et Jean-Baptiste Tuby (1635-1700). Le tableau de Jean Béraud conduit donc le visiteur vers bien des trésors...
L'Histoire a également retenu que la célèbre tour de Nesle s'élevait à l'emplacement de l'actuelle aile est de l'Institut.
Cette tour formait l'extrémité de l'enceinte de Philippe-Auguste et marquait l'entrée de Paris pour les bateliers qui remontaient la Seine. Dans l'obscurité, une lanterne, la première de « Lutèce », se balançait au bout d'une potence suspendue tout au sommet. Les promeneurs de la toile que nous « visitons » pensent-ils à cela ?
Jean Béraud naquit à Saint-Pétersbourg et déménagea à Paris, en 1853, après la mort de son père. Il étudia au Lycée Bonaparte et à l'École des Beaux-Arts où il devint l'élève du maître Léon Bonnat. Ce peintre Belle-Époque, artiste mondain au regard de photographe, connut un grand succès. Il aimait croquer les jolies passantes sur le vif et représenter les rues animées de la capitale, les monuments célèbres et les promeneurs dans leurs beaux habits. Il multiplia les scènes de genre et fut également portraitiste.
Il fut en 1890, l'un des fondateurs de la Société Nationale des Beaux-Arts. Parmi les autres fondateurs, on trouvait Pierre Puvis de Chavannes, Auguste Rodin et Joseph Meissonnier. Vice-président de cette institution, il devint Chevalier de la Légion d'honneur en 1887 et Grand Officier en 1894.
Cet artiste amoureux de Paris repose dans la première division du Cimetière de Montmartre.
Pour un lecteur ami passionné par l'oeuvre de Marcel Proust, Monsieur Richard Lejeune fondateur de Egyptomusée, je rajoute que Jean Béraud fut l'un des témoins de Marcel Proust lors du duel au pistolet qui opposa l'écrivain, le matin du 6 février 1897, au critique littéraire Jean Lorrain. Proust et Lorrain s'affrontèrent suite à une critique des plus violentes, écrite par Jean Lorrain au sujet du premier ouvrage de Marcel Proust, Les Plaisirs et les Jours. Un épisode de vie cité par Patrick Offenstadt dans le Catalogue raisonné : Jean Béraud. La Belle Époque, une époque rêvée, paru chez Taschen, Wildenstein Institute et à Paris en 1999.
Et pour d'autres détails...
J'ai encore bien « discuté » autour du Tableau du Samedi... L'Historienne de l'Art que je suis ne peut pas s'en empêcher et d'ailleurs, si je le faisais, je me ferais gronder par des ami(e)s qui me disent prendre grand plaisir à lire mes billets alors... Je ne chasserai pas le naturel, sourires affectueux !
Merci pour vos gentils messages concernant ma pause d'il y a quelques jours. Je cicatrise en douceur... Je suis encore secouée par le « mélange » crises d'épilepsie, malaise vagal, hématomes et saignements mais ça remonte doucement... Merci à vous et gros bisous, prenez bien soin de vous !
PS: J'ai eu des soucis avec mon précédent billet intitulé Bienvenue à l'Automne 2019... Il s'est publié de nombreuses fois... Je n'ai pas fait de manipulations étranges dans la partie administrative, j'ai fait comme d'habitude et j'ai un drôle de bug avec ce billet qui se "multiplie"... Je suis désolée si vous l'avez reçu en plusieurs exemplaires ou si les newsletters se sont multipliées aussi...